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Yonne Altermondialiste
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11 novembre 2011

Réponse à Bernard Cassen

L’analyse de Bernard Cassen rejoint, finalement, ce qui était au centre de la pensée d’Ernesto Che Guevara, à savoir qu’il existe dans toute l’Amérique latine une unité de fait qui résulte de l’origine ainsi que des conséquences de l’Histoire de ce continent.

 

http://altermondyonne.canalblog.com/archives/2011/11/10/22636237.html

 

Son analyse doit nous interpeler dans la mesure où les pays latino-américains, s’ils sont objectivement américains sont pétris de culture et de comportement européens. En ce sens, son commentaire nous concerne au premier chef. On a envie de dire qu’ils ont pris beaucoup de bon dans la civilisation européenne et en ont laissé les scories que sont la rigidité et l’arrogance du vieux continent. N’oublions pas que les artisans de l’indépendance des États d’Amérique ont étudié en Europe et ont été particulièrement influencés par l’esprit des Lumières et par la Révolution française. On peut regretter, à ce sujet, leur fascination pour Napoléon Bonaparte du moins dans sa période impériale. Rappelons, enfin, que tous les pays qui ont adopté le drapeau tricolore à disposition verticale l’ont fait par imitation du drapeau issu de la Révolution française ; il en est de même pour les partis politiques qui s’en sont inspiré pour leurs symboles.

 

La vie dans les villes sud américaines ressemble beaucoup plus à celle qu’on connait notamment dans les pays du sud de l’Europe qu’à celle du grand État du nord du continent. Nuançons, cependant, en signalant que le système métrique n’est pas répandu et que c’est une manière pour la culture anglo-américaine de pénétrer les esprits.

 

On comprend la sympathie éprouvée par Bernard Cassen pour le continent sud américain. Elle est renforcée par la popularité du Monde Diplomatique (en espagnol et en portugais comme en français) dans cette aire. C’est aussi une des preuves de la proximité, sinon géographique, de l’Amérique latine et de l’Europe. Or, la gauche latino-américaine au pouvoir présente une caractéristique qu’il n’a pas abordée. Cette gauche, qui préside aux destinées des pays mentionnés, appartient à ce qu’on appelle ici la « gauche de la gauche » ou « l’autre gauche » et non à la mouvance sociale-démocrate à l’européenne. Sans doute, pour lui, est-il évident que le terme de « gauche » ne s’applique plus tout à fait aux partis de gouvernement qui se réclament de cette mouvance. Il y a peu, M. Mélenchon soulignait à ce propos que, en Amérique latine, les partis membres de l’Internationale Socialiste ont partout refusé de s’allier avec « l’autre gauche » et ont préféré sceller des alliances avec le centre-droit dans le meilleur des cas, y compris au Brésil contre Lula. Il aurait pu également mentionner Israël où le Parti Travailliste a toujours refusé de former la moindre coalition avec le Meretz (pourtant membre aussi de l’IS) mais s’allie régulièrement avec des partis religieux opposés aux idéaux de laïcité et de socialisme et avec la droite. Inutile de s’étendre sur les conséquences de ce choix délibéré que nous constatons tous les jours.

 

Pourtant, cela devrait faire réfléchir quand on constate l’échec patent des coalitions gauche-droite en Europe qui débouchent invariablement sur des crises politiques graves et sur la montée de l’extrême-droite qui devient, pour beaucoup, la seule opposition réelle quand tout le reste se mêle des affaires du pouvoir. Ces échecs et l’obstination du PS, en France, à persévérer dans cette voie augurent mal des années à venir.

D’autant que, en Amérique latine, les gouvernements de gauche font la preuve de leur capacité à gouverner tout en se préoccupant du sort des classes délaissées, en rendant aux populations les richesses naturelles de leurs pays et en renforçant les classes moyennes. Ce faisant, ainsi que le montre le succès de la politique de Lula au Brésil, la classe possédante s’en trouve consolidée et ne se plaint pas trop des politiques de gauche, ce qui est un gage de stabilité sur un continent qui a été martyrisé par les coups d’État militaires financés par les grandes sociétés implantées sur place.

 

Il est bien évident que le propos de Bernard Cassen vise davantage à éclairer l’opinion publique sur l’alternative politique et sur un modèle latino-américain transposable ici qu’à brosser un tableau de la situation sur un continent qui nous apparait, à grand tort, comme lointain. D’ailleurs, quand on parle d’Amérique, ici, on pense uniquement aux États-Unis et à la limite au Canada avec lequel on se sent un vague cousinage alors qu’il est beaucoup plus influencé par son puissant voisin que par l’Europe au contraire d’un pays comme l’Uruguay, par exemple.

 

Bernard Cassen vise donc à nous mettre en garde contre la tentation de croire qu’il n’y a qu’une politique possible, plus ou moins mâtinée de social et que le PS propose un véritable changement. En fait, il montre que c’est en tournant le dos au modèle dit « social-libéral » que les gouvernements de gauche latino-américains sortent peu à peu leurs pays de la misère et sont en passe d’émerger. Un mot sur la « misère » en Amérique latine. Comme le souligne Bernard Cassen, même dans un pays comme le Brésil qui a permis à 30 millions de pauvres d’accéder à la dignité et qui est devenu la huitième puissance mondiale, il existe des pans entiers d’exclus du progrès social, particulièrement hors des villes et dans les régions difficiles d’accès (très haute montagne, forêt vierge etc.). En revanche, la vie dans les villes fait mieux que soutenir la comparaison avec nos métropoles européennes où, au contraire, le nombre d’exclus qui fait litière de leurs trottoirs ne cesse d’augmenter.

 

Bernard Cassen suggère que seules des politiques résolument de gauche apportent des solutions réelles à la crise financière, économique et écologique que nous traversons. Pourtant, en Grèce, c’est un gouvernement de coalition socialo-libéraliste qui se met en place plutôt qu’une alliance des forces de gauche. Ailleurs, en Italie, en Espagne, les partis sociaux-démocrates peinent à gagner les élections en raison de leur refus de s’entendre avec les formations plus à gauche. Dans ce cas, et pour mener une politique d’austérité, les électeurs préfèrent carrément voter pour des spécialistes de la chose plutôt que pour une copie teintée de rose.

 

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